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Bilan 2023 et perspectives 2024 : un rebond modeste et fragile en France ?

[Janvier 2024] Essoufflement de la demande, affaiblissement des échanges internationaux : l’économie mondiale n’a cessé de ralentir en 2023. Pourtant, et malgré la réapparition du risque d’instabilité financière et les incertitudes géopolitiques successives, la conjoncture a été plutôt résiliente. Va-t-on assister à un rebond en France en 2024 ? Les économistes de BPCE L’Observatoire livrent leur analyse.

Reflux lent de l’inflation, sur fond de ralentissement mondial en 2023

En 2023, L’économie mondiale a subi les conséquences négatives des dérives inflationnistes antérieures sur le pouvoir d’achat des agents privés. Elle n’a pas cessé de ralentir en 2023, du fait de la transmission progressive du resserrement monétaire à l’économie réelle de part et d’autre de l’Atlantique, de l’essoufflement de la demande globale et de l’affaiblissement des échanges internationaux.

Cet effritement de l’activité a mécaniquement provoqué un lent reflux de l’inflation, davantage visible au second semestre, sans mettre cependant un terme à la remontée des taux longs. Pourtant, la conjoncture a été plutôt résiliente, sur fond de réapparition du risque d’instabilité financière, à l’origine aux Etats-Unis, et d’incertitudes géopolitiques successives, allant de la guerre en Ukraine au nouvel accroissement des tensions au Moyen-Orient depuis le 7 octobre.

2,9 % C’est le taux d’inflation en Europe constaté sur un an en décembre 2023.

C’est ainsi que l’inflation, même si elle est demeurée élevée, a amorcé un processus de repli tant aux Etats-Unis (3,4 % l’an en décembre, contre 6,5 % l’an en décembre 2022) qu’en Europe (2,9 % l’an en décembre, contre 9,2 % l’an en décembre 2022), du fait surtout du recul de la composante énergétique.

Poursuite du processus de resserrement monétaire

La Fed (Banque centrale américaine) et la BCE (Banque centrale européenne) n’ont pas sacrifié l’objectif de stabilité des prix pour préserver celui de la stabilité financière. Dans le sillage de la Fed, la BCE a cherché à rattraper son retard sur la banque centrale américaine, afin d’éviter non seulement le risque d’une spirale prix-salaires mais également une chute de la monnaie unique face au dollar. Elle a effectué plusieurs hausses successives de ses trois taux directeurs, portant finalement le 14 septembre les taux d’intérêt des opérations principales de refinancement, de la facilité de prêt marginal et de la facilité de dépôt à respectivement 4,5 %, 4,75 % et 4 %.Les taux à 10 ans de part et d’autre de l’Atlantique se sont quasi-stabilisés au haut niveau de la fin de 2022 jusqu’en juin 2023, après leur remontée rapide résultant du resserrement monétaire et des tensions inflationnistes. Malgré un point haut à 3,55 % le 28 octobre, l’OAT 10 ans a nettement reflué à 2,56 % le 29 décembre, atteignant une moyenne annuelle de 3 % en 2023, contre 1,7 % en 2022.

+ 0,8 % C’est la progression de la croissance française en 2023 contre 2,5 % en 2022.

En dépit de l’affaiblissement de la demande interne, la croissance française, qui s’est située dans une position intermédiaire en Europe, a progressé de 0,8 % en 2023, après 2,5 % en 2022, du fait du soutien de l’investissement productif et du recul des importations. Les prix à la consommation sont restés élevés à 4,9 % en moyenne annuelle, contre 5,2 % en 2022.

Un reflux de la croissance mondiale en 2024 ?

En 2024, la croissance mondiale refluerait légèrement vers 2,7 % selon l’OCDE, contre 2,9 % précédemment, l’inflation continuant, en conséquence, de fléchir. La conjoncture pâtirait toujours de l’atonie des échanges commerciaux et de la fragilisation de la confiance des entreprises et des consommateurs, dans un contexte de diminution tendancielle de l’intensité commerciale de l’activité et d’aggravation des tensions géopolitiques.Outre les menaces géopolitiques, l’activité mondiale et surtout l’industrie européenne continueraient de souffrir du développement de tendances protectionnistes, notamment américaines, à travers des subventions à la localisation sur leur territoire d’un certain nombre de productions. Ce fléchissement serait cependant nettement plus prononcé en zone euro, qu’en Chine et, a fortiori, aux Etats-Unis, qui connaîtraient un atterrissage en douceur.

Une inertie à la baisse des taux longs

Le pic des taux directeurs dans les pays avancés hors Japon a été atteint en 2023, après leur remontée historique. La question serait celle du rythme du desserrement monétaire ultérieur : les marchés financiers anticipent 150 points de base (pb) de baisse sur l’année pour la Fed et la BCE, quand ces dernières jugent ce processus beaucoup trop rapide, même si les tensions inflationnistes s’amenuisent.Par ailleurs, les deux banques centrales poursuivraient la réduction progressive de leur bilan, la BCE annonçant aussi d’accélérer dès juillet 2024. Cela empêcherait les rendements longs de refluer parallèlement à l’assouplissement des taux directeurs, au ralentissement économique et au recul des anticipations inflationnistes, dans un contexte où les primes de risque sur la soutenabilité des dettes publiques des Etats-Unis et de certains pays européens, comme l’Italie ou la France, sont susceptibles d’augmenter.

Un PIB français progressant de seulement 0,7 % en 2024 ?

En 2024, le PIB français, dont la résilience a pour contrepartie un endettement public très élevé, progresserait de seulement 0,7 %, comme en 2023 (+0,8 %), en raison d’un effet d’acquis de croissance peu favorable, hérité du second semestre de l’année dernière, et d’un contexte économique européen guère porteur.

L’amélioration modeste des dépenses des ménages, principaux moteurs de l’activité, serait alors insuffisante pour contrecarrer la prudence accrue des entreprises en matière d’emploi, de pilotage du niveau des stocks et d’investissement, en dépit de la désinflation. L’inflation moyenne reculerait à 2,4 %, du fait de la stabilisation à la baisse des prix de l’énergie et de la poursuite de la modération des hausses de prix de l’alimentation.

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Les auteurs

Eric BUFFANDEAU, Direction Etudes et Prospective

Eric Buffandeau

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