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Bilan 2024 et perspectives 2025 : un décrochage européen et français ?

[Janvier 2025] En 2024, l’économie mondiale a encore été résiliente, tout comme en 2023 et le PIB français a crû de 1,1 %, comme en 2023. En 2025, la croissance mondiale devrait progresser de 3,3 %, la zone euro retrouverait péniblement une dynamique avec une croissance d’environ 1 % et le PIB français progresserait quant à lui de seulement 0,8 %. Doit-on envisager un décrochage européen et français en 2025 ? Analyse des économistes de BPCE.

Désinflation sans récession en 2024

En 2024, l’économie mondiale a encore été résiliente, tout comme en 2023, retrouvant même une progression de l’activité de 3,2 % l’an, en dépit du rétrécissement des échanges internationaux par rapport au PIB et de l’émergence de nouvelles incertitudes majeures. En particulier, deux évènements ont marqué l’année : la dissolution surprise de l’Assemblée nationale française et l’élection présidentielle de Donald Trump aux Etats-Unis.Des deux côtés de l’Atlantique, l’inflation a été vaincue, sans qu’une récession ne soit mécaniquement provoquée par le durcissement agressif des taux directeurs par la Fed (Banque centrale américaine) et la BCE (Banque centrale européenne) depuis respectivement mars et juillet 2022. Celles-ci ont abaissé de 100 points de base (pb) leurs principaux taux directeurs au deuxième semestre 2024, la BCE amorçant avant la Fed le processus dès le 6 juin. Le relâchement des politiques budgétaires, particulièrement aux Etats-Unis, qui a compensé le frein monétaire, a porté l’activité. Aux Etats-Unis, comme en Chine, les dynamiques sont même venues de déficits publics abyssaux, contrepartie d’un soutien de l’investissement, ce qui a renforcé la croissance potentielle. A contrario, le continent européen, en situation de morosité, a continué de prendre du retard face aux stratégies de course à l’hégémonie industrielle mises en œuvre par la Chine et les Etats-Unis. Globalement, la désinflation a permis, en retour, la redynamisation de l’activité, en favorisant de nouveau le pouvoir d’achat des agents privés de part et d’autre de l’Atlantique.

+3,2 % C’est le taux de progression de l’économie mondiale en 2024.

Incertitude politique en France, après la dissolution de l’Assemblée nationale

La France est entrée dans une situation inconnue d’incertitude radicale à la fois économique et politique, après la dissolution de l’Assemblée nationale du 9 juin. La crédibilité budgétaire est devenue la principale victime d’une campagne électorale de promesses de rupture, sans véritable contrepartie en matière de financement. Avec la censure du gouvernement du Premier ministre Michel Barnier le 4 décembre, l’instabilité politique, malgré la nomination de François Bayrou, a pris le relais des craintes inflationnistes. Le PIB français a crû de 1,1 %, comme en 2023. Il a bénéficié de la forte expansion des dépenses publiques et d’une contribution record du commerce extérieur, cette dernière étant surtout liée au recul des importations. Le PIB a été artificiellement dopé par l’impact du déroulement des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 au 3e trimestre. L’inflation s’est nettement repliée : 2,0 % l’an en moyenne annuelle, contre 4,9 % en 2023. L’OAT 10 ans a été de 3 % en moyenne annuelle, comme en 2023. Il a pourtant fini à 3,19 % le 31 décembre, du fait d’une prime de risque accrue de près de 83 pb avec l’Allemagne, malgré le recul de 100 pb du taux de facilité de dépôt de la BCE.

+1,1 % C’est le taux de croissance du PIB français en 2024.

Un décrochage européen et français en 2025 ?

En 2025, en l’absence de choc spécifique, la croissance mondiale devrait progresser de 3,3 % selon l’OCDE, légèrement plus qu’en 2024, surtout tirée par les pays émergents, en raison de la décrue de l’inflation à l’échelle planétaire, de l’assouplissement monétaire de part et d’autre de l’Atlantique, du dynamisme économique américain et d’un certain rééquilibrage entre demande interne et externe en Chine. En l’absence du redressement des prix de l’énergie, la désinflation plus rapide que prévu renforcerait davantage la conjoncture, favorisant le pouvoir d’achat des agents économiques des pays avancés, tout en permettant, de manière induite, la poursuite du processus de détente des conditions monétaires. A contrario des Etats-Unis, la baisse des principaux taux directeurs serait même probablement assez vigoureuse en Europe, reflétant ainsi l’écart de dynamique conjoncturel entre les deux zones, en dépit de la menace de chute de l’euro face au dollar. Sur le plan international, l’impact de l’élection de Donald Trump demeure une source d’inconnues, notamment en ce qui concerne la mise en place rapide de mesures douanières susceptibles de freiner le commerce mondial. La zone euro retrouverait alors péniblement une dynamique un peu moins poussive (respectivement 1 %, après 0,8 %), tout en restant à la traîne par rapport aux économies américaines et chinoises.

Une poursuite de la dérive des dépenses publiques en France

En France, outre un risque important d’accroissement additionnel de la prime de risque des taux d’intérêt face à l’Allemagne et de poursuite de la dérive des dépenses publiques, un supplément d’attentisme peut émerger, du fait de l’instabilité politique. Il pourrait entraîner des comportements plutôt frileux de dépenses des ménages et des entreprises, en dépit de l’effet a priori favorable d’une moindre consolidation budgétaire. En particulier, les motivations d’épargne devraient demeurer puissantes, freinant la diminution attendue du taux d’épargne des ménages, du fait d’un besoin de précaution, avec la hausse du chômage, et de la préoccupation des particuliers pour les déséquilibres budgétaires.

+0,8 % C’est le taux de croissance du PIB français envisagé pour l’année 2025.

Ne bénéficiant plus de l’impact antérieurement positif des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, le PIB français progresserait de seulement 0,8 %, contre 1,1 % en 2024. L’inflation atteindrait une moyenne annuelle inférieure à 1,4 %, contre 2 % en 2024. Par ailleurs, l’OAT 10 ans se situerait autour d’une moyenne annuelle de 3,1 % en 2025, après 3,0 % en 2024 et 2023, malgré le recul de 100 pb du taux de facilité de dépôt, dans un contexte où le déficit public français serait au mieux de 5,4 % du PIB, après 6,1 % en 2024.

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Les auteurs

Eric BUFFANDEAU, Direction Etudes et Prospective

Eric Buffandeau

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