Jeanne Richard est la nouvelle venue en Équipe de France de biathlon. A 23 ans, Jeanne, soutenue par la Caisse d’Epargne Rhône Alpes, est parvenue à se faire une place au sein de ce collectif ultra compétitif qui rassemble parmi les meilleures biathlètes du monde. Il fallait du talent et du caractère. Rencontre avec la jeune pépite du biathlon français.

Vous êtes, semble-t-il, montée très tôt sur des skis ?

Mon père était en effet moniteur de ski alpin, je me suis donc retrouvée, très tôt, à 3 ans, sur des skis. Mais il était également moniteur de ski de fond, j’ai donc aussi pratiqué assez jeune cette activité. J’ai préféré le ski de fond en terme de mentalité et puis, c’était pour moi plus ludique.

C’est étonnant, on a plutôt en tête la difficulté du ski de fond, un sport d’endurance et une image plus fun du ski alpin…

Dès le début, le ski alpin, c’était « full compet ». Même si j’adore la compétition, je me suis rendue compte que le ski de fond était davantage organisé autour du jeu. C’était pour moi du pur plaisir… Les coachs organisaient des petits relais, des ateliers ludiques, on s’amusait beaucoup.

Avez-vous pratiqué aussi d’autres sports durant votre enfance ?

Oui, j’ai fait du patin, du judo, du ski-alpinisme, du tennis, du vélo et même de la danse. Cela m’a beaucoup apporté toute mon enfance d’être ainsi active. Car je suis une vraie passionnée de sport en général.

 Comment êtes-vous venue au biathlon ?

Nous avons la chance, grâce au Comité Ski Mont Blanc, que l’on nous prête une carabine et de pouvoir ainsi s’exercer au tir dès 15, 16 ans. J’ai adoré ça, pouvoir m’entraîner à la carabine. C’était très challengeant. Et je trouvais que cela ajoutait quelque chose à la pratique du ski de fond.

Comment s’est passée votre accession vers le haut niveau ?

Cela s’est fait naturellement. J’ai monté progressivement les échelons, intégré les Ȇquipes de France jeunes jusqu’à me retrouver chez les A.

Vous avez poursuivi des études, cela a-t-il été compliqué de mener un double projet, sportif et scolaire ?

Je trouve ça normal de garder un pied dans les études. D’abord, parce que j’ai conscience qu’il suffit d’une blessure pour que tout s’arrête : on travaille avec notre physique qui est soumis aux blessures. Mener des études apporte de la sécurité pour l’avenir. Ensuite, cela apporte un équilibre. On s’ouvre à d’autres choses que le biathlon. Donc, après mon bac, j’ai entamé un DUT (diplôme universitaire de technologie) de gestion des entreprises et des administrations. J’ai beaucoup de cours en distantiel compte tenu de mes nombreux déplacements. Je me rends à Grenoble pour les partiels. C’est assez bien organisé afin que je puisse mener au mieux les deux activités de front.

Vous venez de signer une magnifique saison 2024 – 2025 (podium en individuel et victoire en relais). Vous finissez au 6e rang mondial alors que vous êtes encore très jeune…

Ça suit son chemin… J’ai eu des hauts et des bas dans la saison mais c’est naturel. C’est l’apprentissage. Il n’y a que les extraterrestres comme Johannes Boe qui performent dès le début. Et encore même lui, il lui arrive de se manquer. J’ai bien conscience que rien n’est jamais acquis, que le haut niveau, c’est un éternel recommencement, que c’est beaucoup de travail.

Néanmoins, lors de votre première course de Coupe du monde l’an passé, vous avez terminé 8e avec un sans-faute au tir et cette année vous être montée pour la première fois sur le podium d’une Coupe du monde (à Ruhpolding en Allemagne sur la mass-start) en faisant à nouveau un sans-faute au tir alors que sur le dernier tir vous étiez à la bagarre avec les meilleures mondiales. Vous faites preuve de sang-froid pour votre jeune âge…

Ce sont des choses que nous travaillons tous les jours, nous nous préparons à cette pression. Et nous sommes constamment mis dans ces situations. On fait trente-cinq courses par an. Moi, dans ces moments de pression intense, je reste simplement concentrée sur mes gestes.

Ce premier podium vous a mis en confiance ? Il validait votre travail ?

C’est exactement cela, on se dit qu’on est dans le vrai. Ça fait du bien. Il y avait une opportunité et je l’ai saisie. Mais ensuite, on sait qu’il faut aller chercher chaque course. Chaque compétition, j’apprends.

Pouvez-vous nous en dire plus sur ce qui vous plaît dans votre discipline ?

Ce que j’aime dans le biathlon, qui est un sport individuel, c’est que c’est également une discipline collective. On s’entraîne en groupe, et on a des compétitions en équipe avec en plus maintenant, des épreuves mixtes. Et tout cela en pleine nature.  

L’Équipe de France féminine de biathlon est actuellement, sinon la plus forte, du moins une des plus fortes de l’Histoire. Comment vivez-vous cette situation ?

Je pense que c’est un plus. C’est hyper stimulant de vivre et de s’entraîner avec les meilleures mondiales. Ça nous tire toutes vers le haut. Pour moi, c’est très riche d’apprentissage. C’est une chance unique.

Quel est votre point fort ?

Je pense que c’est ma capacité à me concentrer dans les moments forts. Je suis focus sur ma tâche. Notamment dans ce moment très important de la transition de la phase de ski pour se mettre en position de tir. J’arrive à bien gérer cette phase.

Le biathlon est une discipline solitaire et en même temps comme vous l’expliquer, collective lors des relais. Comment gérez-vous cet aspect ?

J’aime particulièrement les relais. C’est une tout autre course, très prenante.

D’aucuns sont un peu écrasés par la responsabilité du relais. Car la moindre faute impacte toute l’équipe, pas seulement soi-même…

Moi au contraire, le relais me transcende. L’énergie est différente et je tire une dynamique positive du relais. Et puis lorsque l’on obtient un résultat, on le partage avec toute l’équipe. C’est trop beau…

Si vous deviez retenir une valeur qui vous est chère dans ce sport ?

La persévérance. Car dans notre sport, la moindre erreur nous renvoie très vite au fond du panier. Et ça arrive à tout le monde, même aux plus forts. Aussi, la persévérance est essentielle. Ne jamais renoncer… Et puis, c’est une valeur qui me servira ensuite dans l’existence.  

Comment se présentent vos prochaines échéances sportives ?

J’ai très envie de participer aux Jeux Olympiques. Et pas comme remplaçante !

Vous êtes dans la meilleure équipe du monde, les places vont être chères ?

Oui, il n’y a que quatre places mais l’avantage c’est que si on est qualifiée, ça veut dire que l’on est performante et que l’on est au niveau !

Il y a les Jeux Olympiques l’année prochaine en Italie (Milano Cortina) et puis en 2030, en France. On a vu avec Paris 2024 ce que représentait cet événement à la maison pour les athlètes français. Comment appréhendez vous cette future échéance ?

C’est merveilleux d’avoir les Jeux Olympiques à la maison, ça rend les choses belles pour l’avenir. J’espère que je serai encore dans cette équipe et que les choses auront bien évolué pour moi.

En parallèle, vous êtes également policière réserviste, pourquoi ce choix ?

La Fédération française de ski est en partenariat avec la police et propose des contrats pour nous, les athlètes. C’est une vraie chance de faire partie de cette institution. Alors, c’est un défi de mener cela avec les entraînements, les études. Cela demande une vraie organisation.

Comment se passe une semaine type pour vous ?

J’ai six jours d’entraînement par semaine. Avec un jour de repos le dimanche même s’il arrive parfois que lon s’entraîne le dimanche. La séance du matin dure entre 2 h et 2 h 30 et celle de l’après-midi, 2 heures. On a en plus trois séances de musculation par semaine. Et cinq ou dix sorties en ski-roue… On dispose d’un mois de pause entre deux saisons durant lequel j’essaie de couper vraiment, de lâcher prise. Mais comme j’adore le sport, je peux faire d’autres activités. Là, par exemple, j’ai fait une course de ski de randonnée.

Avez-vous une alimentation particulière ? Êtes-vous suivie par un nutritionniste ?

Non, je mange normalement, de manière équilibrée.

Comment avez-vous « rencontré » la Caisse d’Epargne Rhône Alpes et qu’est-ce que cela vous apporte ?

Je savais qu’ils avaient un engagement fort dans le sport, qu’ils étaient très dynamiques… Nous avons été mis en relation grâce à mon entourage. Grâce à ce partenariat, j’ai une sécurité financière qui me permet de me consacrer à mon sport, de pouvoir m’entraîner pleinement. Mais au-delà de l’aspect financier, c’est sympa de se sentir entourée, soutenue. Ça booste. Ils comprennent les enjeux. Et puis, nous formons un collectif de sportifs, et ça fait plaisir d’appartenir à une équipe. On échange avec les autres athlètes du collectif. On a un groupe WhatsApp, on s’encourage, on se félicite quand on a des résultats.
Lorsque Léo Anguenot (ski alpin) a décroché son premier podium en Coupe du monde à Alta Badia en décembre dernier, je l’ai appelé. Et lui a fait pareil quand j’ai obtenu mon premier podium en Coupe du monde.  

Parmi les différents partenariats qu’elle a bâtis, la Caisse d’Epargne Rhône Alpes a constitué une « team » d’une dizaine de champions issus des Équipes de France de ski et de snowboard dont fait partie Jeanne Richard. Ils portent haut les couleurs du ski français et de leur région et représentent des espoirs de médailles sur les compétitions internationales.